Ancien plan (1881)
« Voici le roman que je veux écrire. Des êtres bons et honnêtes, placés dans un drame qui développera l’idée de bonté et de douleur.
Puis, tout l’effort portera surtout sur la facture. Pas ma symphonie habituelle. Un simple récit allant au but. Les milieux jouant toujours leur rôle nécessaire, mais moins en avant ; les descriptions réduites aux strictes indications. Et le style carré, correct, fort, sans aucun panache romantique. La langue classique que je rêve. En un mot, de l’honnêteté en tout, pas d’emballage. »
Documents préparatoires de La Joie de vivre, NAF 10311, f° 366.
Ébauche
« Lisa et Quenu sont emportés par le choléra à quelques jours de distance. Voilà Pauline seule, à l’âge de neuf ans. Elle doit tomber à un tuteur naturel, parent de Quenu, avec sa fortune ; on estime la charcuterie, et c’est le tuteur qui doit la gérer.
Pauline tombe donc un soir chez son tuteur, inconnu, remise par le conducteur de la diligence (à arranger).
Et tout le roman va être l’action de cette enfant dans la famille Chanteau.
Pauline a neuf ans, Lazare vingt. Et leur amour étudié. Mais je tiendrai surtout à étudier dans un être l’émiettement que j’ai souvent étudié dans les choses. Avec Lazare, j’ai la peur du néant, de la mort. […]
Une maladie de nos sciences commençantes. L’avortement de l’Éducation sentimentale repris, mais dans les faits plus serrés. Et en face la joie de la vie, toujours droite dans sa volonté, dans sa santé, dans le bonheur de l’habitude, dans l’espoir du lendemain. Sans thèse, il faut que Pauline soit la réponse aux malades de nos sciences commençantes par son abnégation, sa gaieté, etc. »
Documents préparatoires de La Joie de vivre, NAF 10311, f° 144-145, 151.
« Peut-être vaudrait-il mieux que j’étudie cela avec le père Chanteau, pour avoir toute une vie et pour ne pas être gêné par l’étude de l’amour, que je garderai pour le fils. Donc avec le père, voir ce que cela me donnerait. Il peut avoir quarante ans au début, revenir sur le passé pour expliquer le commencement de la maladie morale. – Non, il faut que la maladie porte sur Lazare lui-même : j’ai la scène où elle commence au dehors ; j’ai la mort de la mère ; j’ai le mariage et l’accouchement. Mais il faut que cette maladie soit un vrai émiettement, mangeant un être que je représenterai d’abord comme très actif, voulant une œuvre (peut-être ce qui doit sauver le village de la mer), reprenant cette œuvre plusieurs fois, puis l’abandonnant définitivement ; et le village est englouti.
Bien établir les plans, la gaieté s’en va d’abord, la force ensuite, la volonté enfin. – Et rien n’apparaît au dehors, tout se passe en dedans. – À la fin une ruine qui marche.
Je voudrais parallèlement faire une étude de la mère, la ruine d’une conscience par une première mauvaise pensée. Quand elle a recueilli Pauline, avec son argent, elle peut avoir l’idée de relever toute la famille avec cet argent. Elle est très honnête, adore l’enfant, la soigne. Puis peu à peu je veux la montrer la volant, puis devenant plus coquine pour cacher ses vols et enfin la détestant et mourant en craignant le poison.
Mais ce qui me gêne, c’est l’idée générale de ce qu’apporte Pauline. Je la fais tomber dans une maison qui va mal, et je voudrais qu’elle y apporte la joie de vivre. Non, ce ne peut être cela. Il faut la montrer, elle, avec la joie de vivre, par dessus toutes les catastrophes, se relevant chaque fois et relevant les autres (plus ou moins). On lui prend son argent, on lui prend son cœur, et elle ne se plaint pas, elle vit toujours gaie après les crises, elle se relève de toutes les crises. Il faudra rendre cela sensible à la fin par une scène, berçant l’enfant et soignant le vieux.
Documents préparatoires de La Joie de vivre, NAF 10311, f° 145-147.
Plan de 1883
I. 1860. 9 ans. Attente de Chanteau, de Lazare et de Véronique. Le village posé, le pays, maison emportée, les habitants, le curé. La maison et l’église. Arrivée de Mme Chanteau et de Pauline. Dîner. Pauline s’endort et Mme Chanteau raconte les hist. de Caen et celle de Paris, la tutelle, etc. – On monte se coucher. Aigreur dans la maison.
II. 9 à 12. Jeunesse de Pauline. Promenade avec Lazare, première peur de celui-ci. Instruction de Pauline. Lazare à Paris, musique puis médecine, et retour aux vacances. Louise introduite et jalousie de Pauline. Crise de Chanteau. Honnêteté de Mme Chanteau. La maison plus heureuse.
III. 12 à 16. Lazare lâche la médecine, et son idée d’exploitation ; retour au village. Mme Chanteau ruine Pauline, et l’idée de mariage. Amour de Pauline et de Lazare. Livres lus par Pauline, elle sait tout, l’éducation qu’elle se fait. La spéculation lâchée.
IV. 16 à 18. Louise reparaît, et Lazare la désire, saute d’amour. Jalousie de Pauline. Charité aux enfants du village, toutes les histoires. Les épis construits pour protéger le village. Une crise de Chanteau. La haine commençante de Mme Chanteau. La musique reprise.
V. 18. La maladie de Pauline. Lazare la soigne. Le docteur développé. Étude de la souffrance. Puis la convalescence, et Lazare retournant à Louise qui est revenue. Les titres chez elle. On lui tire de l’argent.
VI. 18. Mme Chanteau favorisant son fils et Louise, lorsque la ruine de Pauline est consommée. Lazare écrit un mémoire. Pauline surprenant Louise et Lazare, et chassant Louise. On l’a dépouillée de son argent et on lui prend son cœur. Crise de Chanteau. Épis emportés, enfants et cancans, le village revient.
VII. 19. Maladie et mort de Mme Chanteau soignée par Pauline. Véronique pour Pauline. Lazare battant le pays comme un fou. – Enterrement.
VIII. 19 à 20. Le coup reçu par Lazare. Étude de l’idée de la mort en lui. Le cimetière, le curé bêchant. La visite aux épis emportés. Pauline croyant que Louise est nécessaire à Lazare, son analyse et commencement de lutte. La mort du chien.
IX. 20 à 21. Lutte de Pauline contre elle-même. Elle triomphe et va chercher Louise. – Les jours qui passent. Explication avec Lazare, puis avec Louise : elle les donne l’un à l’autre, et partira. Le mariage. La musique reprise et les épis refaits. Le village reparaît, enfants. Suicide de Véronique.
X. 22. Lazare et Louise mariés, tous deux à Paris. Dernier avortement de Lazare, son émiettement dans le ménage. Il vient passer quelques jours, analyse, Pauline a peur de l’aimer encore. Puis, c’est Louise qui revient, et le retour définitif, après l’échec. Pauline veut partir.
XI. 22. Les couches terribles de Louise, avant terme. Tout le drame de famille. Le docteur et le curé. Dernière révolte de Louise tenant l’enfant. (Le petit village englouti, les épis emportés ?). La confession de Lazare, là ou au suivant.
XII. 24. Pauline restera, vaincue par l’enfant. Le triomphe de la bonté et de l’abnégation. Pauline entre l’enfant et Chanteau qui a une dernière crise. Le recommencement avec l’enfant. Les trois âges. Le calme, après les tortures.
Documents préparatoires de La Joie de vivre, NAF 10311, f° 2-3.

Plan de Bonneville. Documents préparatoires de La Joie de vivre, NAF 10311 f° 336