FICHE PERSONNAGE
« 48 ans. – Un malin qui sent péricliter sa maison et qui la revend, sous prétexte de rhumatismes. Lui, après l’avoir achetée il y a dix ans, y a vivoté en la conduisant avec les plus strictes économies.
Veuf. Très avare. Se retire même, dit-on, avec de petits gains ; mais il s’en va à temps. « Oh ! si Vinçard s’en va, c’est que le bâtiment coule. »
Un homme de quarante-cinq ans, né à Paris, l’air franc, la mine ouverte, donnant continuellement sa parole d’honneur, et fichant tout le monde dedans. Large face ronde, yeux à fleur de tête, collier de barbe, mise cossue. – Il se fera restaurateur, mettra tout dans une guinguette de barrière. C’est là son idée : la bouche va toujours, une fortune à faire. Il n’en parle à personne, cela lui est venu après une noce. Sa terreur de ne pouvoir vendre et sa joie quand il a vendu ; enfin il va donc se mettre dans une partie où il y a à gagner et où la concurrence n’est pas à craindre. Son restaurant au Point du Jour. Le remontrer à la fin, parlant de son nouveau commerce la bouche pleine, n’ayant plus le moindre rhumatisme, et s’étonnant même quand on lui en parle. »
Documents préparatoires du Bonheur des Dames, NAF 10278, f° 159-160.
BIOGRAPHIE
Marchand de soieries rue Neuve-des-Petits-Champs, près du passage Choiseul ; un magasin propre et clair, d’un luxe tout moderne, petit pourtant et pauvre de marchandises. Avec ses yeux ronds et sa bouche loyale, Vinçard a l’air franc, la mine ouverte, il donne sa parole d’honneur avec la facilité d’un homme que les serments ne gênent pas. C’est un finaud qui joint les deux bouts avec une avarice de chien et qui, battu en brèche par le Bonheur des Dames rêve de vendre son fonds avant la débâcle ; voulant séduire Robineau, il lui présente la maison comme une affaire d’or et s’interrompt pour geindre, malgré l’éclat d’une grosse santé, se plaignant de ses sacrées douleurs, qui le forcent à manquer sa fortune. Le coup fait, ses rhumatismes ont disparu. Avec les quarante mille francs de Robineau, il a pris un restaurant à Vincennes ; cette idée d’un commerce de bouche, où l’on peut voler à l’aise, lui est venue après la noce d’un cousin, où l’on a fait payer dix francs par tête des pâtes nageant dans de l’eau de vaisselle.
(Au Bonheur des Dames)