FICHE PERSONNAGE
« 20 ans. Remisier. Le type du remisier, Busnach, Becque, d’autres. – Un gros garçon apoplectique, rougeaud, cheveux roux, lèvres fleuries, gros yeux bleus à fleur de tête. L’air gai, mais une déveine noire. Subit toutes les rebuffades du métier. Le courtier, le commis voyageur en valeurs. Ne réussit pas, ne réussira jamais. Il joue et perd. J’en fais un catholique, qui grogne toujours après la Bourse, et qui ne peut pas faire autre chose, puisqu’il est là-dedans. Condamné à être remisier à perpétuité. – Pour donner du mouvement à la figure, le montrer avec quelque espoir au début ; puis des hauts et des bas, peu à peu roulé ; et la conviction, à la fin, qu’il traînera éternellement ce boulet, touchant toujours à la fortune, sans l’atteindre. – Français, catholique, ne s’y amusant pas.
Je le ferai un peu déclassé, le fils d’un magistrat de Lyon, qui a mal tourné. Il a fait des études incomplètes d’avocat, ou même a été reçu, s’est découragé, et s’est trouvé jeté à la Bourse.
Documents préparatoires de L’Argent, NAF 10268, f°353-354.
BIOGRAPHIE
Remisier. Fils d’un magistrat de Lyon, frappé d’indignité. Est devenu employé à la Bourse, n’ayant pas voulu continuer ses études de droit, après la disparition de son père. C’est un gros garçon rougeaud, aux jambes courtes, aux yeux bleus d’une limpidité enfantine. Longtemps malchanceux, avec son air inquiet de bon chien battu, il a pris une importance énorme depuis qu’il est au service de la Banque Universelle, il réalise des gains superbes et ne dit plus, comme autrefois, qu’il faut être juif pour réussir. Mais s’il a violé la chance, sur les talons de Saccard, il sort de son rêve les reins cassés. Au jour de la catastrophe, il doit soixante-dix mille francs et, alors qu’il pourrait, comme tant d’autres, invoquer l’exception de jeu, il fait celte bêtise sublime et inutile de payer, il emprunte à des amis, s’engageant pour la vie entière, sans que personne lui en sache gré, car on hausse même un peu les épaules derrière lui.
(L’Argent)