FICHE PERSONNAGE

« Philippe (26 ans).Normand. Parle anglais, menteur, se vante. Petit, mais joli et bien râblé, plus distingué que Bouthemont, blond et rose. Né en Normandie, à Yvetot. Fils d’un cafetier. Tête ronde, bouche sensuelle, hâbleur, gourmand. Fait son chemin d’une façon aimable, en flattant tout le monde et en mettant dedans tout le monde. Le bon vendeur, et intriguant, visant la place du premier. À la fin, il y arrivera, en débinant les autres. – C’est de lui que Louise [Denise] pourra tomber amoureuse, sans jamais le lui dire. Lui fera la vie avec d’autres et ne s’apercevra pas qu’elle se serait donnée peut-être dans un moment d’oubli. […]

Il mange tout. Jamais un sou. Gai et avalant tout. – La lutte pour la vie. À la fin, quand il est premier, il peut s’apercevoir que Louise [Denise] l’aimait et qu’il aurait pu l’avoir. Son regret, ou son indifférence. Il se fiche des femmes, en a au dehors, mais ne s’en inquiète pas au dedans.

La lutte pour la vie avec Hutin. Et gaiement, tout pour l’argent et pour le plaisir, avec l’invincible besoin de manger les autres.

Rien avec les clientes. Il laisse croire. »

Documents préparatoires du Bonheur des Dames, NAF 10278, f° 118-119.

BIOGRAPHIE

Employée la soierie, au Bonheur des Dames. Petit, aimable et gras, il joue la bonhomie. C’est le fils d’un cafetier d’Yvetot ; il a su en dix-huit mois devenir un des premiers vendeurs, par une souplesse de nature, une continuelle caresse de flatterie qui cache un appétit furieux, mangeant tout, dévorant le monde, même sans faim, pour le plaisir. Dans la bataille de la vente, il se promène devant les comptoirs, les dents longues, voulant sa part, jalousant le voisin. Bon étalagiste, hâté de parvenir, il rêve de supplanter le second, Robineau ; opérant de son air aimable, il le mine sourdement et parvient à ameuter contre lui le rayon entier ; il le. chasse ainsi à force de mauvais vouloirs et de vexations. Plus tard le bilieux Favier, qu’il a beaucoup mis en avant pour cette besogne, le mangera à son tour.

Hutin canote et entretient des chanteuses de café-concert. Entre lui et le gantier Mignot, il y a une rivalité de jolis hommes qui se vantent de bonnes fortunes dans la clientèle ; mais le soyeux n’a conquis véritablement qu’une passementière, lasse de traîner dans les hôtels louches du quartier. Il affecte de mépriser les vendeuses ; sans un mot maladroit d’Henri Deloche, il aurait toujours ignoré l’amitié naïve que lui a vouée jadis Denise Baudu. Devenu second, Hutin se révèle terrible, d’une sévérité hargneuse : le rayon se ligue maintenant pour pousser Favier contre lui, tandis que lui-même dévore sourdement Bouthemont, dans le but obstiné de prendre sa place. Il a quitté l’hôtel de Smyrne, rue Sainte-Anne, pour prendre un appartement de trois pièces ; il a lâché les chanteuses et affiche maintenant des institutrices. Premier au départ de Bouthemont, sentant que Favier, plus fort que lui, l’éliminera vite, il a le talent de se faire enlever au Bonheur des Dames par madame Desforges, qui va le placer aux Quatre-Saisons.

(Au Bonheur des Dames)

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