FICHE PERSONNAGE

« 65 ans. Né en 1804. De taille moyenne, trapu, plein de force encore, très droit et solide, avec son corps carré. Mains fortes et pieds grands. – Cheveux blancs en brosse, collier de barbe blanc coupé, assez ras ; pas de moustaches. Teint coloré, sans excès. Très grand nez, bouche lippue, front bas, yeux bleus (ancien blond). – Air général : sévère et dur, bourgeois, avec des échappées de bonhomie. Il faut qu’on tremble un peu autour de lui, qu’on le respecte, et que ses familiarités brusques lui gagnent des cœurs. La jeunesse de Séverine : il pèse sur elle, mais elle sait qu’il n’est pas si noir, qu’il la caresse. Toujours le goût des femmes, en arrière. Il a été très rigide avec sa femme, il a toujours eu des maîtresses au dehors. Une façade rigide, avec des sauts par derrière.

Il ne m’est nécessaire d’ailleurs que pour le procès, l’affaire criminelle. On parle tout le temps de lui, bien qu’il ne soit plus là. Poser donc, au premier chapitre, son portrait physique et moral, dont il ne faudra plus se départir. »

Documents préparatoires de La Bête humaine, NAF 10274, f° 556-557.

BIOGRAPHIE

Membre du conseil d’administration de la Compagnie de l’Ouest. Né en 1804, substitut à Digne au lendemain de 1830, puis à Fontainebleau, puis à Paris, ensuite procureur à Troyes, avocat général à Rennes, enfin premier président à Rouen, nommé, le jour même de sa retraite, commandeur de la Légion d’honneur. Une des plus belles carrières de la magistrature. Riche à plusieurs millions, le président fait partie du conseil général de la Seine-Inférieure depuis 1855. Il possède un hôtel à Paris, rue du Rocher, et réside souvent chez sa sœur, madame Bonnehon, au château de Doinville.

Trapu et solide, blanc de bonne heure, d’un blanc doré d’ancien blond, les cheveux en brosse, le collier de barbe coupé ras, sans moustaches, avec une face carrée que les yeux d’un bleu dur et le nez gros rendent sévère, il a l’abord rude, il fait tout trembler autour de lui Le président Grandmorin est adonné aux pires débauches, il a un goût prononcé pour les fillettes gentilles, comme Louisette, la seconde fille de madame Misard. Parrain et tuteur de Séverine Aubry, il l’a initiée à ses pratiques séniles et l’a plus tard mariée avec Rouhaud, continuant à rechercher la femme et accordant sa protection au mari. Ce dernier, mis au courant trois ans après, l’assassine dans l’express du Havre, entre Malaunay et Barentin, à hauteur de la Croix-de-Maufras, endroit même où Grandmorin avait abusé de sa jeune pupille. Le président laisse une fortune de trois millions sept cent mille francs, dont presque la moitié consacrée à des legs équivoques. Il donne notamment à Séverine Aubry la maison de la Croix-de-Maufras.

(La Bête humaine)

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