GÉNÉALOGIE

« Née à Plassans en 1768 ; mariée en 1786 à Rougon, jardinier ; en a un fils en 1787 ; perd son mari en 1788 ; prend un amant, Macquart, en 1789 ; en a un fils en 1789 et une fille en 1791 ; devient folle et entre à la maison d’aliénés des Tulettes en 1851 ; y meurt d’une congestion cérébrale en 1873, à l’âge de 105 ans.

– Détraquée. (Arbre généalogique des Rougon-Macquart – 1869 n°1)
– Meurt folle (Arbre généalogique des Rougon-Macquart – 1869 n°2)
– Névrose originelle. (Arbre généalogique des Rougon-Macquart – 1878)
– Névrose originelle. (Arbre généalogique des Rougon-Macquart – 1893)

FICHE PERSONNAGE

« 104 ans. (née en 1768).

Elle avait 83 ans en 51, lorsqu’elle est devenue folle, et il y a, en 72, 21 ans qu’elle est folle.

La même, d’ailleurs, que dans La Conquête de Plassans, en 1858, époque où elle avait 90 ans. Il y a quatorze ans de cela. – Elle est bien douce, ne donne pas d’ennuis à la maison. Elle reste assise, à regarder devant elle. Depuis 7 ans, elle n’a pas bougé (Il y a douze ans dans La C. de Plassans, ce qui mettrait le roman en 1863 ; mais pour les âges il ne peut être qu’en 1858, cinq ans plus tôt ; à cause des âges de Pierre et de Félicité).

Prendre son portrait dans sa jeunesse, la scène avant d’être folle (note au crayon). Grande créature, mine pâle, aux regards effarés. – Plus tard roidie, figée, vieille religieuse, aux blancheurs molles, face bleuie et coiffe blanche »

Documents préparatoires du Docteur Pascal, NAF 10290, f° 95.

BIOGRAPHIE

Mère et aïeule des Rougon-Macquart. Elle a donné naissance à la branche légitime, par Pierre Rougon, et aux deux branches bâtardes, par Ursule et Antoine Macquart. Adélaïde, née en 1768, est orpheline à dix-huit ans. Père mort fou. Elle est une grande créature mince, pâle, aux regards effarés, aux lèvres charnues, bizarre d’allures, on lui croit le cerveau fêlé. Héritière des plus riches maraîchers du pays, elle épouse un lourd jardinier, Rougon, qui meurt quinze mois après, lui laissant un fils, Pierre. Avant la fin de son deuil, elle est la maîtresse du contrebandier Macquart, qu’elle aime d’un amour de louve, et elle en a deux enfants, Antoine et Ursule, élevés côte à côte avec Pierre. Dès les premières couches, elle a subi des crises nerveuses qui s’aggravent lorsque son amant, surpris à la frontière pendant qu’il introduisait de la marchandise en fraude, est tué par le fusil d’un douanier. Les troubles hystériques d’Adélaïde la jettent dans des convulsions terribles, la détraquent complètement en peu d’années et la livrent sans défense aux duretés de son fils légitime. Dès quarante-deux ans, elle a des airs vagues de vieille femme tombée en enfance. Elle s’est retirée ans la masure de Macquart et vit d’une pension de six cents francs, que Pierre lui a consentie lorsqu’il l’a dépouillée de sa fortune ; elle vieillit dans une existence monacale, en un renoncement absolu, avec des accidents nerveux périodiques. À soixante-quinze ans, Adélaïde a la face blême, un masque vague, les regards éteints, les mains agitées d’un tremblement sénile. Elle recueille son petit-fils Silvère Mouret, âge de six ans, qui l’appelle tante Dide et pour qui elle se prend d’une tendresse ineffable. L’enfant grandit avec elle, la soignant, l’aimant, et lorsqu’au coup d’État, il meurt sous ses yeux, victime des haines et des luttes sanglantes de la famille, tué par un gendarme comme l’a été le grand-père Macquart, tante Dide, maudissant ses fils criminels, achève de devenir folle et est enfermée dans l’Asile d’aliénés des Tulettes.
(La Fortune des Rougon)

Elle est toujours internée comme folle et reste une des plaies vives de la famille. La petite propriété de son fils Antoine Macquart est voisine de l’Asile. Pierre Rougon semble avoir posté là le vieux drôle pour veiller sur l’aïeule. Adélaïde n’a jamais donné de l’ennui à la maison : elle reste assise, à regarder devant elle ; depuis douze ans, elle n’a pas bougé.
(La Conquête de Plassans)

À cent quatre ans, elle vit toujours, ainsi qu’une oubliée, une démente calme, au cerveau ossifié, chez qui la folie peut rester indéfiniment stationnaire, sans amener la mort. C’est un squelette jauni, desséché, tel qu’un arbre séculaire, dont il ne reste que l’écorce. Dans son mince et long visage, il n’y a plus que les yeux de vivants, des yeux d’eau de source, vides et clairs, sans pensée. Immuable en son fauteuil, tante Dide est là, comme le témoin gênant du passé, comme un spectre de l’attente et de l’expiation qui évoque, vivantes, les abominations de la famille et fait peur à Félicité Rougon. Un accident soudain, le petit Charles Saccard atteint d’une hémorragie nasale, le filet de sang venant former une flaque aux pieds de la folle, réveille ce cerveau endormi depuis vingt et un ans. La vieille aïeule revoit dans un éclair le gendarme qui, d’un coup de pistolet, a cassé la tête de Silvère, elle revoit aussi l’homme qui a fusillé, comme un chien, le contrebandier Macquart ; ce troisième choc sanglant achève de l’abattre et elle meurt le lendemain, âgée de cent cinq ans trois mois et sept jours, enlevée par une congestion pulmonaire.
(Le Docteur Pascal)

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